Emmanuel Macron a chuchoté la majorité relative à Macky Sall
(La victoire trompe-œil de l’opposition et de la démocratie)
Le 3 août, avant la publication des résultats officiels des législatives (4août en soirée), j’annonçais, sur ma page Facebook, une majorité relative en faveur de la coalition BBY.
Pendant ce temps-là, Déthié Fall et Mimi Touré proclamaient, chiffres à l’appui, leurs victoires respectives avec une majorité absolue. Les deux camps rivaux disposaient de leur propre mode de calcul, combinant la proportionnelle au scrutin majoritaire, dans le ressort départemental et national. Personnellement, cela m’a donné une migraine !
C’est donc la majorité relative qui a eu raison des prétentions victorieuses de l’opposition et en particulier de l’intercoalition Yewwi-Wallu. Celle-ci s’est confirmée par l’obtention de 82 voix en faveur de la majorité parlementaire. BBY a la moitié des sièges au sein de la nouvelle législature. Pour obtenir le sésame de la majorité absolue, à savoir juste un siège de plus, il suffit de faire de la diplomatie politique, plus connue sous le nom d’entrisme et de transhumance. C’est loin d’être une mission impossible au Sénégal pour le pouvoir et ses délices !
Pour l’intercoalition Yewwi-Wallu, la majorité absolue ne peut être atteinte qu’en lorgnant sur les 3 partis restants, appelés au lendemain de la proclamation des résultats, faiseurs de rois. L’inquiétude au sein de l’intercoaltion Yewwi-Wallu se mesurait très vite avec l’appel de Bara Gaye, maire de Yeumbeul Sud, le 4 août : en cas de transhumance, il faudra prendre des sanctions.
La majorité relative de BBY, cette idée ne m’est pas venue par hasard, et je vous en dévoile plus aujourd’hui sur le plan franco-sénégalais qui a abouti à une situation politique inédite au Sénégal.
La majorité relative a été politiquement et soigneusement (même si cette idée s’est imposée dans la ligne droite, juste avant la proclamation) préparée par Macky Sall, renfermée dans son bunker présidentiel. Il lui était impossible de passer en force avec une majorité absolue. La victoire de l’opposition, a fortiori dans les grands centres urbains, pourvoyeurs de députés, était trop nette. La montée en puissance de Pastef était une réalité sur le terrain. Il était impossible de l’enrayer par une fraude massive. A coup sûr, une instabilité durable politique s’installerait au Sénégal.
C’est alors que les calculettes sortent. Dans le camp présidentiel, à l’exemple de Mimi Touré, d’aucuns plaident pour une majorité absolue « toute relative ». Au vu de la remontée des résultats jusqu’au ministère de l’intérieur, cette option commence par devenir minoritaire. Un nouveau bras de fer entre Macky Sall et Ousmane Sonko causerait trop d’incertitudes quant à son issue.
La France n’en veut pas. Le désordre international, avec l’Ukraine et Taïwan, est trop déstabilisant pour ajouter une autre crise politique majeure dans le monde. Après les câbles inquiets de l’Ambassade de France, le président Emmanuel Macron entre alors en scène. Plusieurs échanges téléphoniques s’en suivent entre les présidents., Il est convenu de sauver le soldat Macky Sall par une majorité relative, la cohabitation étant impossible. Les voix qui manquent viendront du réservoir nordiste. L’essentiel, in fine, est de gouverner, même avec une seule voix de plus, au tout début de la législature. Macky Sall ne peut pas perdre ces élections législatives.
Le piège de la majorité relative se referme très vite sur les opposants. Ces derniers déclarent urbi et orbi victoire. D’un point de vue arithmétique, ils ont raison. D’un point de vue de la science politique, le doute est permis.
L’intercoalition Yewwi-Wallu ne contestera pas les résultats des législatives. Dans mon post de Facebook du 3 août, j’avais déjà informé de la conséquence cynique de la majorité relative. Il serait très mal venu de causer des troubles à l’ordre public alors que BBY a perdu la majorité absolue. C’est un fait historique dans la vie politique sénégalaise. Les Sénégalais ne comprendraient pas cette obstination de la part de l’opposition.
Le 4 août, le président français, publiquement, félicite sur son compte Twitter le peuple sénégalais avant les résultats officiels. En effet, quelques heures avant ! A ce moment-là, il connaît le résultat final puisqu’il l’a soufflé à Macky Sall. Sans prendre garde, Emmanuel Macron fait référence à son échange téléphonique du 3 août où l’accord a été scellé entre les parties.
La suite ? C’est le quotidien français Le Monde qui nous en apprend plus à travers un article « Une vitrine démocratique en danger ». La motivation en est la montée inexorable d’Ousmane Sonko, il franchit les marches du pouvoir les unes après les autres. Dans cet article, il y est mentionné noir sur blanc que les intérêts français sont menacés. Je ne vois pas très bien le lien avec la démocratie !
Le plan franco-sénégalais d’isolement d’Ousmane Sonko est plus que d’actualité. C’est une urgence. D’où la majorité relative qui donne une illusion à l’opposition que la démocratie sénégalaise a été respectée. C’est loin d’être pourtant le cas. La 2ème phase du plan franco-sénégalais sera désormais de casser l’intercoalition Yewwi-Wallu. Macky Sall ne manque pas d’arguments pour le faire. Cette étape devrait débuter dès septembre.
Une victoire de l’opposition en trompe-l’œil, c’était plutôt bien vu de la part d’Emmanuel Macron et de Macky Sall. Leur but est bien de casser la dynamique de Sonko, de ne pas le victimiser, et de l’isoler avec patience. Le Qatar entrera bientôt en scène, le cheikh Tamim ben Hamad Al Thani étant très proche d’Emmanuel Macron. Ce sera l’objet d’autres développements prochainement !
Emmanuel Desfourneaux